Kazakhstan droit de vent

Kegen ( frontière kirghize), Sary Ozek, Almaty, Taldikorgan, Ucharal, Zaisan ( frontière chinoise), Kazakhstan // Juillet 2018

Le Kazakhstan, c'est beau, c'est grand, c'est vide et y'a du vent et des chevaux. 

Mais comment voyage-t-on en vélo dans le 9eme plus grand pays du monde alors qu'on a un visa de 30 jours au mois de juillet ?

On ne choisit pas l'itinéraire le plus court mais celui où l'on pense que la route est asphaltée et on croise les doigts pour que le vent soit dans notre dos. Nous entrons par le Kirgizstan, Kegen, au sud-est du pays et nous choisissons de sortir vers la Chine par le poste frontière de Zaisan, le plus au Nord possible, de manière à ce que notre traversée chinoise du Xinjiang soit la plus courte possible (état policier oblige). Il s'agit donc tout de même de parcourir 1700 km dans le mois, ce qui est largement au dessus de notre moyenne. Mais le relief relativement plat après notre épopée kirgize nous permettra d'y arriver facilement.

Des paysages variés au Kazakhstan, on en aura vu mais tous les 500 km!

On commence par la vallée de Karkara qui jouxte le Kirgizstan. A vrai dire dans cette region, on a du mal à faire la distinction entre les 2 pays. C'est très vert, de grand pâturages avec des chevaux lancés au galop bordés de montagnes enneigées, des yourtes par-ci par-là, une langue commune, et l'éternelle odeur de mouton s'échappant des cuisines. Et j'oubliais, de belles petites averses pour nous rappeler que "c'est pas nous qui commande".

En 2 jours de vélo, nous voilà déjà descendu d'un cran. On longe la rivière Sharyn qui propose un oasis de verdure dans le paysage qui a viré au jaune et au sec. Et même mieux, elle a creusé au fil des siècles un canyon magnifique. Alors tant qu'à y aller, on décide d'y camper! Au point de vue, on se fait interpeller "Bonjour, vous êtes français ? Je suis journaliste pour le Parisien, est ce que je peux vous poser quelques questions ?" " Au Parisien ?! Pas de soucis, mais est ce que tu peux nous expliquer comment un journaliste du Parisien se retrouve au milieu du Canyon de Sharyn !" Stéphane va faire un article sur les 20 ans d'Astana, la capitale, et sur le tourisme au Kazakhstan. Nous sommes donc la bonne cible ! Il est surpris car il a croisé 1h plus tôt 2 Français en tandem, Fleur et Aurélien, avec qui nous sommes en contact depuis quelques mois via WhatsApp, car nous nous suivons de près. Si tout va bien, nos 4 trognes seront dans le Parisien au mois de septembre !

Riviere Sharyn

Canyon de Sharyn vu d'en haut

Canyon de Sharyn vu d'en bas

Après la pause rafraîchissante tout au fond du Canyon, nous allons nous confronter aux fameuses routes en ligne droite, que nous baptiserons route à podcast en particulier lorsque le vent a décidé de nous chatouiller les moustaches plutôt que les omoplates. Le secret des lignes droites, c'est de ne pas les regarder en face. À droite et à gauche, c'est beaucoup mieux et surtout ça passe plus vite. Et puis quand c'est plus long que long, on met les écouteurs, à ce moment là l'unité de mesure ne sont plus les km mais le podcast, et ça passe beaucoup plus vite. C'est l'EPOdcast! Nous voilà donc au point sur Affaires Sensibles notamment.

courage, ça va bien arriver quelque part!

Mais en dehors de la rectitude de la route, on avait surtout pas prévu une telle chaleur et un désert à cet endroit ! Nous suffoquons, et étudions notre style pour se protéger du soleil écrasant. Alors que nous attendons 16 h pour reprendre les bicyclettes, la topologie kazakhe nous contraints de rouler vers l'ouest pour plusieurs centaines de km. Au moment de repartir, nous avons le soleil pleine face, éblouis et sans un cm² d'ombre, le moral chute. C'est donc ça la steppe? Nous ne pourrons jamais rouler ces 1600 km dans ces conditions... Quoi faire, prendre le train? Nous avons aussi une grosse pensée pour Micha et Juliette qui roulent plein ouest depuis plusieurs mois. Ils doivent être rosis par le soleil couchant !

Solution Alexisjacky : nuque longue, manche longue et surtout chaussettes dans les sandales et crème solaire pour le reste

Solution Gaellepasbelle : chemise d'Alexis pour les manches longues, aeration ventre à l'air, foulard du désert mis comme on peut + crème solaire pour le reste

Des pancartes d'épiceries bien rafraîchissantes mais ça s'arrête là : ni fruits ni frigo qui marche !

Notre chemin croise celui de 2 Français, Yves et David, en vacances. C'est vrai que c'est déjà les vacances de juillet ! Et pendant que nous luttons contre la chaleur, la France essaie d'échapper aux orages. Nous sympathisons rapidement, et ils nous proposent de nous amener avec leur voiture louée jusqu'à la dune chantante d'Altinemel. Cette dernière est presque sur notre route, à quelques 80 km prêt. Nous sautons sur l'occasion. Nous faisons chanter la belle dune en attendant le coucher du soleil. Il s'agit de s'assoir dans le sable et tel une chenille, se faire glisser à l'aide de ses talons. La belle dune entre alors en résonance et dégage un son grave et doux à la fois. De quoi occuper, ma foi, une bonne demi-heure avant l'apéro.

Pour une fois c'est pas nous qui crevons !

Fausse alerte ! Ce n'était pas ça la steppe, ni les températures moyennes kazakhes. Juste une canicule dans un désert. Ouf! On le realise après notre aller-retour en train à Almaty pour notre visa mongol, alors que nous reprenons la route longeant un massif, croisant des rivières et en essuyant quelques gouttes. La steppe ça sera pour plus tard. Nous attendions avec excitation l'expérience d'une ramification du transiberien avec les vélos. Ça en valait la chandelle. Se faire comprendre au guichet pour acheter les billets, prendre le vieux train pour pouvoir y entasser nos vélos, contourner le contrôleur qui nous envoie un "vélocipède niet" et lui dire que si, ça rentre, à 5h du mat, observer les allers-retours des kazakhs en pyj qui viennent de passer la nuit à bord, se dire que le wagon c'est rien d'autre qu'une étuve en tôle où il y fait 50°. Idem pour le retour :  "vélocipède niet" alors que des compères chargent des pare-brise dans notre wagon, rigoler quand on nous fait signe de glisser un bifton au contrôleur, lui dire sisi ça rentre on l'a fait à l'aller en mime, s'endormir bercé par le bruits des roues dans les rails. Entre-temps, on découvre l'ambassade mongole au Kazakhstan à la veille des congés annuels (ouf), on arpente Almaty la bling bling, on regarde la demi finale de la coupe du monde avec 2 motards lillois, et on trouve le meilleur atelier vélo d'Almaty. En 20 minutes on a 2 nouveaux boîtiers de pédalier grâce à Crankmaster, de quoi attaquer la Mongolie sereins.

Fan

Taldikorgan 17h. Toujours un peu galère de camper proche ou dans une ville. On cherche du wifi pour regarder Google satellite. Une famille sort du resto que l'on vise... On passera la soirée avec eux : thé -repas, promenade digestive puis resto et dodo sur le canap. On repart chargé de cadeaux. On est pas au courant, mais ils publieront notre venue sur le compte Instagram de la ville. 3554 like et 500 km plus tard, nous sommes toujours connus et reconnus, ce qui nous vaut quelques cadeaux supplémentaires ! Dans les villages, on croise souvent des gens qui nous ont vu sur la route. Il n'y a qu'une route et peu de touristes encore moins de cyclos s'aventurent par ici. La dernière semaine au Kazakhstan, nous nous serons invités sans cesse. Si la route est un peu longue, et la voiture sûrement plus adaptée aux distances, nous ne regrettons pas du tout notre itinéraire tant l'expérience humaine est riche. Aller là où l'étranger ne va pas, c'est être sur pour ce dernier que sa venue sera une fête, nous passons alors pas mal de temps à table! On se rappelle de ce jeune homme arrêtant sa voiture, heureux, nous exprimant sa joie : "In my village, tourists, it's Amazing!"

a partir de la on voyage des déguisements plein les saccoches!

Liste des cadeaux insolites :

Une énorme pastèque

5000 tenges ( environ 12 euros)

Sac de bonbons

Gros sac de Kourout X5 ( fromage archidur, genre de doubitchou )

Fouet avec une patte de biche

Robe de chambre fourrure violette

Foulards x4

Gilet sans manche à paillettes

Coca cola

Sushi!

Chocolat Kazakhstan donné en Drive

Une deuxième pastèque ( qu'on a refusé)

Un serre tête diademe à paillettes fait maison

Un gros poisson fumé emballé dans un journal

2 litres de jus de tomate des militaires à la frontière

Un carnet chiot en couverture

Une tasse Russe

Du fouet, on ne gardera que la photo, la frontiere chinoise approchant...

Les fameux Kourouts qu'on a appris à aimer

Ces rencontres et invitations tombent à pic, en 3 jours d'intervalle, le réchaud puis la tente se cassent. Usure probablement. La tente sera réparée avec un rayon et le klaxon puis par une clé à bougie offertes par 2 étudiants français en vadrouille. Pour le réchaud, va falloir faire autrement, l'embout est fendu. Alors on reprend les bases de scout, ce sera cuisine au feu de bois... Quand y'a du bois... Alexis sort tout fier son système D, réchaud canette ultra léger à alcool à brûler. Pas facile comme mission de trouver de l'alcool à brûler. On finit avec 4 pipettes d'alcool à 90 de la pharmacie, parfait pour un café tiède les matins.

Le sacrifice du klaxon

Rechaud canette fonctionnant avec de l'alcool

Option feu de bois, bière et robe de chambre

J'allais oublier la finale de la coupe du monde... Nous nous sommes appliqués pour savoir quel jour on était et pour arriver pil poil dans le plus grand bled 100km à la ronde : Kabanbay. On repère un endroit où nous pourrons planter la tente à la nuit, puis nous nous mettons en quête d'un café avec télé. L'un est fermé, l'autre accueille les classars de 58, on en déniche un autre, ça s'annonce pas mal, il y a une grande télé. Elle ne fonctionne pas, dommage, mais Dila, la gérante a compris notre requête et est déjà au téléphone pour nous arranger quelque chose. Avec nos 3 mots de Russe et de Kazakh et beaucoup de déduction, nous comprenons que son père a voyagé en France et qu'il va regarder le match. Elle nous conduira et on pourra dormir chez elle, trop sympa, merci! Mais d'abord on boit une bière et Dila nous prépare des shachliks (brochettes). Le début du match approche mais Dila ne semble pas du tout sur le départ, Alexis finit par allumer la radio sur son téléphone. Une Babouchka (mamie en russe) du village, assise à notre table et vraiment 0 en communication ne nous lâchera pas du regard pendant 45 min. Quelle ambiance de folie ! À la mi-temps nous nous dirigeons finalement vers sa maison. Il y a de l'orage, la télé saute, se sera donc sur l'ordinateur. Après 10 min, on peut voir la fin du match sur grand écran ! Youhou, on met l'ambiance avec un peu de retenue. Bravo les bleus!

Allez les bleus, ambiance de folie

Il fallait comprendre : et 1... Et 2 et 3-0

À 16000 km, pour les bleus on fait pouet pouet

Après Kabanbay, nous remontons plein nord dans la steppe. Cette fois, nous y sommes dans la steppe kazakhe. Et comment le sait-on ? Disons que les villages s'espacent puis disparaissent, la végétation est rase, c'est valloné, une odeur de marécage asséché et surtout des tonnes de moustiques et... Du vent... Plein la face! Pendant 4 jours, c'est un peu dur. Nous croisons un cycliste coréen qui arrive de Mongolie, nous prédisant un vent de folie, mais dans notre sens! De quoi nous donner un peu de courage. Nous quittons la route principale pour les derniers 400 km avant la Chine. Nous nous rapprochons de l'Altaï. Nous suivons une rivière, les hordes de chevaux se multiplient, jusqu'à nous réveiller aux aurores par le bruit de leur sabot, au galop, à quelques mètres de la tente, et le vent tourne pour nous pousser doucement vers l'Est. Une idée nous trotte dans la tête : Martin et Thibault rencontrés au Kirgizstan, ont pour projet de rejoindre la Mongolie en vélo et train, puis d'acheter deux canassons sur place puis de traverser la Mongolie à cheval. Quel projet ! Moi qui rêve de faire un peu de cheval. Les dates collent à peu prêt avec les nôtres, alors on leur propose de leur racheter les bêtes pour se promener un peu. On a lancé ça un peu à la rigolade, mais ça trotte dans la caboche, et, entourés de chevaux en liberté les questions vont bon train : combien de km peut faire un cheval par jour? Combien de temps sans boire? Comment faire la nuit? Etc... Acheter un cheval! L'aventure dans l'aventure, surtout pour Alexis qui peut compter ses expériences cavalières sur 2 doigts. Au rythme de nos projections nous nous rapprochons de la frontière chinoise avec un peu d'appréhension. Nous ne quitterons pas le Kazakhstan sans avoir goûté au Beshbarmak qui veut dire "5 doigts". Traversée d'un village vers 18h, un papy croise notre regard puis s'agite en nous faisant des signes. On hésite mais on voulait s'arrêter prendre de l'eau, alors on y va. C'est des retrouvailles familiales, on est synchro, ils allaient passer à table. Sur cette dernière trône un mouton en pièce, la tête au sommet du monticule de viande. Et comme son nom l'indique, ça se mange avec les doigts. En tant qu'invités, on nous sert les meilleures parties à savoir l'oreille, la cervelle, le gras des fesses... Le tout bien sûr arrosé de koumiss, le lait  de jument  fermenté. hmmm on s'est senti bien loin de chez nous...

Hmmm super, du beshbarmak !

Steppe kazakhe et sans asphalte

Nouvelle ligne droite

Superbe tabouret

Mosquée de pèlerinage où nous ferons une pause ...

Chez Bolat, artiste collectionneur d'assyk, les osselets de mouton!

Interview et meeting avec le gouverneur de la province

Inattendu!

Sympa mon vélo !

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