Souriez, vous êtes filmés

Frontière Sino-Kazakhe, Xinjiang, Chine // Début Août 2018

Notre entrée en Chine va décidément être bien compliquée!
Nous campons à 15km de la frontière Sino-Kazakhe afin d'arriver au plus tôt pour passer la frontière, au milieu de rien.
Nous arrivons donc tôt dans la matinée face à 2 militaires kazakhs gardant l'entrée de la frontièr qui nous voient débarquer avec nos vélos. Après quelques coups de talkie walkie, ils nous expliquent qu'il est impossible de traverser les 4km qui nous séparent des bâtiments de contrôle kazakhs et surtout chinois, à vélo. On ne peut traverser qu'en camion ou en bus. Nous tentons de négocier pour embarquer nos vélos dans le prochain camion qui passe mais rien a faire, il faut attendre un bus, prévu .... Le lendemain ! Heureusement nous avions pris une journée de marge et pouvons officiellement rester une journée de plus au Kazakhstan grâce à nos visas, mais nous voilà bloqués derrière les barbelés, sans un Tente kazakh (pas de magasin ici de toute façon), et une peu limite côté réserve de nourriture. Il est pas question qu'on fasse un demi tour de 50 km comme nous le suggerent les militaires pour trouver hôtel et supermarché. On commence donc à installer notre campement à côté, et les militaires nous amènent gentillement jus de tomate et eau pour patienter jusqu'au lendemain.

On en profite pour tester notre hamac où l'on peut, pas d'arbre dans les parages

Et voilà notre campement final devant la frontière

On bouquine, on mange, on fait la sieste pour tenter de soigner un mal de ventre étrange qui commence à arriver dans mon estomac.
La journée passe finalment assez vite et nous voyons les derniers camions de la journée qui attendront le lendemain pour passer. Nikolaï un chauffeur Russe vient à notre rencontre et nous propose de prendre l'apéro dans sa cabine. Il est habitué à passer la frontière chinoise, il nous montre son passeport rempli de visa chinois et est bien content de nous annoncer que c'est la dernière fois qu'il traverse cette frontière si sécurisée.
Au programme de l'apéro, vodka, bière, nickel pour mon mal de ventre, nouilles, petits bouts de lards, ça faisait longtemps ! Merci Nikolaï pour cet apéro et le godet en fer offert !

Nikolaï, notre hôte de fortune

Nous nous réveillons tôt pour plier bagage et attendre, un peu anxieux, le fameux bus qui nous ouvrira la porte de la Chine. 8h35 toujours rien, l'aurait on louper ? Est ce qu'on a bien compris les infos des militaires ? Ouf, finalement le voilà, avec ces touristes Kazakhs surtout venus faire du business à la frontière. On embarque nos sacs et les vélos, c'est parti !
Contrôle kazakh, les saccoches passent au rayon X, le bus est fouillé, tout va bien. Tampon de sortie OK !
On remonte dans le bus, contrôle chinois maintenant...
On passe dans une machine les mains en l'air, on est scanné, pris en photo, on nous demande nos téléphones... Ah bon pourquoi faire ? Et bien l'on découvrira en les récupérant qu'une copie intégrale de nos téléphones a été faite et peut être même plus, qui sait ! Même celui de Gaëlle dont on avait volontairement déchargé la batterie. 

Une policière : "Quenaïfe, quenaïfe" ??
Gaëlle : 'No, no'
La même policière vers moi : "Quenaïfe, quenaïfe" ??
Moi, j'hésite un peu en regardant Gaëlle et répond non également, pas très convaincu... On a quand même quelques 6 couteaux (haha) qui traînent dans nos saccoches ! Et ceux-ci n'ont pas le droit d'entrée sur le territoire.
Visiblement on les a convaincu... Nos bagages sont malgré tout passés au crible, rayon X, fouillés, mais on arrive incroyablement à passer entre les gouttes ! Nos planques dans le sachet de flocon d'avoine, dans les outils, dans des poches secrètes de nos sacs ont fait l'affaire.

Même nos vélos sont passés aux rayons X, dans la machine spéciale gros bagages, je dois à moitié rentrer dans la machine pour éviter qu'ils se bloquent ! Merci pour le gros bagage ;-)

C'est bon nos vélos sont acceptés aussi ! Après une nouvelle session photo, empreintes digitales et quelques directives beuglé par le seul policier parlant 3 mots d'anglais, coup de tampon chinois, nous y voilà ! On a réussi l'épreuve, en trichant un peu mais c'est passé.

Ça y'est nous voilà en Chine et on comprend rien aux panneaux

Les routes sont nickels, du beau bitume, du beau grillage tout le long des routes et des caméras tous les 100m alors que l'on est sur une route avec rien à la ronde, ça va pas être facile de s'échapper pour camper ! Bienvenue au Xinjiang, où les libertés se font rares, sur tout si tu es Ouïgour !

Quand on trouve une faille dans les grillages du bord de route, on se retrouve heureusement vite isolés

Et parfois même on trouve de chouettes spots arborés

A 17000km on se met aux nouilles et aux baguettes

On nous en avait un peu parlé, on s'y était un peu préparé et on avait lu quelques articles qui font parfois un peu froid dans le dos. Cette région du Nord Ouest de la Chine grande comme 3 fois la France tout de même est habité par les Ouïgours, une ethnie de confession musulmane, enfin je devrais presque dire était car ils sont de moins en moins representés, leur proportion à diminué énormément ces dernières années avec l'envoi de Hans, l'ethnie majoritaire chinoise et de 'camps d'éducation' pour les Ouïgours... Y'a un peu des airs de Tibet sauf que l'on entend encore moins parler.
Du coup tout est filmé, enregistré, espionné, contrôlé... Et plus si affinités. 
Quelques exemples du quotidien, si tu achètes un couteau, celui-ci est associé à ton identité via un QR code, reconnaissance faciale dans les hôtels (j'ai vu mon visage avec une petite coche verte sur une caméra signalant que j'avais été identifié), hôtels différents pour les étrangers et les chinois. Tu veux faire le plein de ta voiture ou ton réchaud à essence Pas de soucis, suffit de laisser ton passeport à l'entrée des barricades des stations essences, t'enregistrer et acheter l'essence, pour savoir quelle quantité, quelle date..., Pas de photos à l'appui c'était un peu délicat ! Oui toute la technologie disponible est utilisée et sûrement plus encore...

Petites barricades devant bâtiment quelconque, je vous laisse imaginer celles devant les stations essences

Après ce petit apparté, nous profitons tout de même de découvertes culinaires étonnantes et nouvelles tous les jours, c'est plutôt varié, mais mon mal de bide continue et s'accentue de jour en jour. Ça rend le pédalage et le camping bien moin confort !

On sait pas toujours ce qu'on mange, les papilles aiment, mon bide moins

Hum, je vais prendre cette ligne la, j'aime bien ces petits signes !

Et ça c'est ce qu'on obtient ! Miam miam

Les pattes de poule sous vide, on n'a pas osé

Que prend-il en photo ? Un QR code pour payer, plus besoin de sortir sa monnaie

Les villes que nous traversons sont étonnement aérées et plutôt agréables à circuler à velos. Entre les villes ce sont des champs de centaines d'éoliennes qui remplissent les steppes a perte de vue. Il faut bien alimenter les batteries des centaines de scooters électriques qui déambulent dans les rues de ces villes bien étendues. En effet c'est a chaque fois une surprise de découvrir la taille de la ville, car sur nos cartes et gps elles semblent souvent des villages avec quelques rues et finalement on arrive sur des villes étalées sur plusieurs kms.


Quand on arrive en ville

C'est parfois un peu Disneyland, ça permet d'oublier les postes de police tous les 200 mètres



Heureusement il y'a encore quelques artistes de rue semble-t-il

Nous décidons alors d'expérimenter les sorties du week-end des chinois, un lac se trouvant sur notre route, on se dit que ca doit être une sortie courrue dans le coin car l'eau se fait rare. En effet en arrivant, bon nombre de voitures affluent vers le lac, barrage de police et contrôle sécurité et nous voilà aux abords aménagés du plan d'eau.
Nous découvrons des chinois qui se baignent à moitié habillés, dans une zone bien balisée, mangeant brochettes et poissons grillés, une ambiance plutôt conviviale avec des styles très.... Hétéroclites !



La fameuse casquette dark Vador chinoise

La zone 'baignable' bien balisée 

Les quelques yourtes d'ouïgours vendant des pierres le long des routes

Toujours accueillants même si on ne saura pas qu'elle langue ils parlent, Kazak, chinois, ou Ouïgour tout simplemement

Finalement lors de notre dernier et presque unique contrôle de police, on tombe sur des agents plutôt joueurs

Même si le sourire reste crispé


Nous arrivons maintenant proche de la frontière mongole après une traversée du Xinjiang où nous sommes plutôt bien passés entre les mailles des contrôles sécurités, mais pas entre les mailles d'une digestion difficile, enfin pour ma part ! Les épices et autres nouvelles saveurs ont eu raison de mon estomac et après 8 jours à pédaler avec un mal de ventre parfois m'obligeant à nous arrêter, nous décidons d'aller faire un contrôle dans un hôpital chinois avant de passer côté mongol où les soins seront encore plus compliqués à trouver, voir inexistants avant la capitale.
La petite ville à la frontière a un hôpital mais pas de docteur... Il nous faut donc rejoindre une ville plus grande a 80km de route a bord d'une magnifique ambulance style Playmobil !
L'aventure commence quand il faut expliquer la situation et le contexte de mon mal de ventre, évidemment personne ne parle anglais et tout le monde dégaine son téléphone, outil magique de la communication pour les Chinois... Ils n'est pas pensable pour eux de tenter de communiquer sans !
Alors nous tentons tant bien que mal différents traducteurs plus ou moins efficaces. Je fais finalement appel à une ancienne collègue chinoise de GDF via WhatsApp, VPN et wifi de l'hôpital qui nous fera la traduction malgré le décalage horaire !
Après quelques examens on me prescrit médicaments modernes et d'autres plus traditionnels. Au moment de tenter de récupérer une facture pour l'assurance (le bonheur de l'administratif) une alarme retentit dans la rue... Comme dans la matinée dans le premier hôpital visité.
Nous voyons des infirmiers courrier vers la rue avec des espèces de batte de baseball, on avait déjà vu ces battes dans les restos et commerces mais sans comprendre leur utilité. 
C'est en fait un exercice anti-terroriste, au cas où les méchants Ouïgours poseraient problème, on ne sait pas bien comment vu comment ils sont traqués ! 
Donc une bonne partie des commerces et institutions font régulièrement ce genre d'exercices, un peu à la manière de nos exercices incendie à l'école ! On a notre explication et notre facture. Retour à la frontière et à un riz-gime avant d'entrer dans le territoire mongol et de retrouver une liberté certaine !

Pas au top, peut être le confort de l'ambulance pas très rassurant



La fameuse 'batte' posée discrètement dans l'accueil de l'hôpital


C'est trop injuste, régime riz pour moi !



Voici quelques articles si vous êtes curieux de la situation surprenante dans cette région de Chine :

Comment le Xinjiang est devenu le laboratoire high-tech du contrôle social ?

Les camps d'internement débarrassent la Chine de classes entières de la société

Comprendre la répression des Ouïgours de Chine en cinq questions

La Chine détiendrait un million de Ouïgours dans « des camps d’internement »

Un podcast d'ouïgours qui temoignent

Commentaires

  1. Bon rétablissement Alexis!!! J'espère que tu seras vite remis sur selle !!!! C'est pas d'chance, mais au moins vous avez la réponse à la question des "battes"!! Ça aurait dur de continuer sans savoir, bien sûr! Gros bisous et bon courage!

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    1. Tout va mieux depuis deja longtemps ! Le retour a la cuisine chinoise après la Mongolie s'est bien passé ;-)

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  2. C'est chaud.... Je n'avais en effet jamais entendu parlé de cette région de la Chine....

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    1. c'est effectivement bien triste, et en parler est deja une chose simple que nous pouvons faire pou les aider...

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  3. Salut les amis, vous êtes partis pour 10 ans??? Alexis avec son mal de ventre il chinoise. Vous devez en prendre plein les yeux c’est super.
    Bonne continuation et a bientôt
    Alain

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    1. Ahah, arrivons bientôt au terme de notre périple avec le Japon. Même s'il reste le retour celui-ci sera plus rapide avec le trans-siberien !

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  4. Coucou , oulala , Il n'a pa l'air bien effectivement " le gars d'Alexis " , tu as voulu tester les hosto chinois , tu me raconteras ça . Prends soin de toi et de gaelle . Bonne continuation. Biz à vs 2 . Martine

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    1. Ouais ce n'était pas un test très concluant mais finalement tout s'est bien terminé ! La difficulté c'est surtout la communication.
      Biz

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  5. Pas mal la collegue de GDF qui sert de traductrice. Je me souvenais pas de cette annecdote !!!

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    1. En chine faut trouver des alternatives aux téléphones car ils sont vite scotchés dessus !

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