Bretelles, régime et Havre de paix

Pour se remettre un peu dans le contexte : nous profitons de la pause à la boulangerie pour chiader la suite de notre itinéraire, et nous nous autorisons quelques folies ! Le canyon de vikos dans le massif des Zagoria est assez renommé. Une bonne occaz pour enfin sortir nos bretelles (de sac à dos) et se lancer dans quelques jours de rando. 

Pour cela, il nous faut une base pour laisser saccoches et vélo. On voit un warmshower en pleine montagne, totalement isolé, un peu loin du canyon. On hésite un peu car ça n'est pas vraiment notre route, et sans faire demi-tour pour la suite nous devrons faire plusieurs dizaine de km sur des pistes pour quitter le massif. Bon, en vrai on hésite pas longtemps car ces perspectives d'aventures nous allèchent quelque peu. C'est décidé, nous irons à Gyphtokampos à la maison en bois de Takis et Vassili, perdue dans la forêt.

Une étape costaud nous attend pour y parvenir : 60km et 1900m de dénivelé. Nous nous lançons dans la côte, en étant prévenu que le coin est touristique et que les petits villages de montagne sont authentiques mais brassent beaucoup de visiteurs... Voilà comment on se rate comme il faut sur les courses ! Pas d'approvisionnement en montagne ! La dernière épicerie-supermarché est à 10km derrière nous mais à 500 m de dénivelé plus bas. Oups, Bah on trouvera bien une solution.

On arrive à la tombée de la nuit sur le chemin de Gyphtokampos, après s'être aventuré sur une route déserte entouré d'une épaisse forêt et longeant une belle rivière. Sur notre droite de jolies petites huttes en "paille". Un panneau indique "Sarakatsaran village". D'abord 2 chiens aboient puis nous sommes accueilli 5 minutes après par Takis et Vassili avec un grand sourire : " nous allons commencer une séance de yoga, venez si vous voulez!" Et ben pourquoi pas! Après cette grosse journée, ça ne peut que nous faire du bien ( parfait pour la souplesse d'Alexis !). On passe donc le portail et on se rend compte que nous sommes sur le lieu de mémoire Sarakatsaran, une tribu de berger faisant la transhumance. Une parcelle de forêt magnifiquement aménagée. De l'herbe, des sapins, des sources, les huttes témoins des Bergers, un petit chalet en bois dans lequel ils dorment. Au centre un immense emplacement pour faire du feu, et là une dizaine de personnes assises en arc de cercle pour commencer la séance de yoga. Ça donne un petit côté shamanique. Tina qui est la aussi depuis quelques mois a organisé un weekend d'initiation. Nous passons donc une première soirée bien sympa avec toute cette compagnie. Il y a aussi un autre cycliste allemand qui est là depuis quelques jours et qui n'arrive plus à décoller. Il faut dire que ce lieu à quelque chose de simple et de magique, que Tina, Takis et Vassili sont totalement sympas et accueillants et arrivent à faire en sorte d'inclure les gens qui passent ici à leur mode de vie, et on ne peut pas repartir d'ici indemne ! Ah oui, ils cuisinent aussi formidablement bien des plats végétariens et sont fan de dub française ( et connaissent Saint Étienne grâce à la Dub Inc;)

Nous laissons donc nos vélos au repos ici pendant que nous partons dès le lendemain crapahuter dans la montagne pour 3 jours de rando. L'idée est de faire 15 km en stop pour rejoindre le départ de la rando. Puis 15 km de marche pour arriver au Dragonlake à 2000m d'altitude. Le lendemain redescendre de l'autre côté et entrer dans le canyon de Vikos, dormir dans le canyon, traverser le canyon et remonter de l'autre côté, rentrer en stop à Gyphtokampos. Idéal et bien ficelé. Sauf qu'on commence par 15 km de marche sans croiser une voiture, qu'on arrive à acheter quelques trucs pour remplir seulement un petit estomac (du pain, des tomates et des pommes) , qu'on ne commence la (vrai) rando qu' à 14h et que comme il n'y a pas d'eau en chemin on est hyper chargé. On peut vous dire que finalement c'est pas parce qu'on a 3500 km de vélo dans les pattes, que la randonnée c'est facile. On se prend une grosse claque !

Ruches électrifiées contre les ours!

Stop raté

Un platane qu'on retrouvera dans bien des villages grecs

Au dodo direct, de toute façon on a pas grand chose à bouffer, et à 2000, il fait froid. Au lendemain, seuls les petits dragons du lac et la vue magnifique réconfortent les douleurs de nos jambes. 2000m de descente nous attendent, ça crisse à chaque pas et on choppe des ampoules.

Y paraît que ce sont des espèces préhistoriques qui n'ont pas eu besoin d'évoluer. Qui nous en dit plus?

Pour terminer la journée, on ne trouve pas la source indiquée sur nos cartes. Alexis est plus préoccupé par la faim, moi c'est l'eau qui me stresse, toujours peur d'en manquer. On essaie de mettre en place des règles d'économie d'eau. Mais on trouvera bien assez vite la source suivante, Ouf! Malgré ces péripéties, on est skotché par le paysage qui nous entoure. Le Verdon n'a qu'à bien se tenir. Son grand frère Vikos, c'est pas de la purée. Comme on a pas assez crapahuté, on termine la boucle avec un petit bonus. Après avoir vu le canyon de l'intérieur, on va chercher la vue panoramique 3 étoiles en empruntant les skalas de Vradeto. Chemin construit il y a des centaines années comme seul accès au village de Vradeto. Étonnante anecdote, mais depuis qu'une route a été construite dans les années 70, le village a été déserté !

Skala

Le retour aux vélos se déroule sans hic, la camionnette du boulanger nous amène à bon port. Ce sera la seule voiture qu'on croise. La boucle est bouclée. 

On décide de rester un peu à Gyphtokampos se reposer et apprécier l'harmonie qui règne ici. Comment décrire ou qualifier se qui se passe ici? Pas facile, mais je dirais hummm... Un havre de paix. Oui c'est ça un havre de paix, et à peu de chose près, on se voyait bien y rester...

Mais nous sommes au début de notre aventure et celle-ci nous appelle. Un peu triste de s'en aller, nous repartons pour une journée entière de VTT, pour essayer de se désenclaver sans revenir sur nos pas. Si vous avez bien suivi, à part la délicieuse cuisine végétarienne de Takis, Tina et Vassili nous n'avons toujours pas croisé de ravitaillement, nos saccoches sont vides ! De Gyphtokampos, nous emmènerons avec nous quelques salutations au soleil spéciales vélo. Un peu de yoga pour terminer une journée, c'est un chouette cadeau.

Lors de cette journée VTT, nous faisons 2 rencontres notables. D'abord une Fiat Panda 4x4 qui s'arrête. 2 mecs sympas qui font le marquage VTT pour une prochaine course et surtout qui nous font cadeau 2 brugnons bien juteux (yes!). L'autre rencontre est un peu plus inédite. Nous peinons à monter sur la piste, dans les cailloux, peut-être à 5km/h. Suffisamment lentement pour qu'au détour d'un virage, à 30 m de mon petit vélo, je surprenne... un OURS! On se fige, on se regarde une pleine seconde et POUF poudre d'escampette. À peine si Alexis peut me croire, heureusement le raffut d'un ours qui décampe vient illustrer mes propos.

Vouvoussa, c'est bien par là

Au village suivant, une petite cantine pour notre unique repas de la journée. Le lendemain, Vassili (un 2eme, il y en a 3 au total) rencontré à Gyphtokampos retrouve notre camp et nous amène un petit sachet de course ! Trop sympa et Alléluia, la solution pour la journée.

Encore 2 jours avant un supermarché. Nous arrivons sur un beau lac dont les pourtours sont cultivés. On interpelle une dame dans son potager pour lui acheter des légumes. Elle cueille 5 kg de courgettes qu'elle nous offre généreusement, ce soir c'est la fête dans nos assiettes.

Une autre fois, alors qu'on a rien demandé, une voiture sortant d'un verger s'arrête et nous tend un sac entier de poire. Plus loin du raisin ! On avait pas vraiment de raisons de s'inquiéter, c'est la période de récolte et les gens sont tellement généreux, sans crier gare. Certainement un mélange entre l'effet vélo et l'effet philoxenia, la fameuse solidarité grecque. En tout cas, on adore voyager à vélo ici!

Alexis préfère la lévitation au Yoga

Ps: nous apprendrons non sans tristesse 15 jours plus tard que nos 3 compères se sont fait subitement délogés par le nouveau président de l'association Sarakatsaran. Gyphtokampos ne sera plus ce que Takis et Vassili en avait fait... On espère de tout cœur que leurs nouveaux projets se réaliseront.